Le dérangement des mammifères marins est un sujet difficile à traiter car, pour le connaître et le mesurer, on crée souvent un dérangement tout aussi important que celui qui existait auparavant. La situation devient vite kafkaïenne ! Bien entendu, nous avons toujours tendance à penser que le voisin est beaucoup plus bruyant, voire irresponsable et irrespectueux que nous-même, mais la science ne se satisfait pas de telles allégations et demande des preuves. Alors comment faire ?
Le GECC a tenté de répondre à cette question par le biais d’un mémoire de Master 1 intitulé : « Impact et gestion des activités de tourisme et de loisir sur les mammifères marins de la baie de Seine à la baie de Saint-Brieuc ». Ce travail, le premier en son genre et sur la zone, confirme que le dérangement reste difficile à prouver de manière formelle. Il faudrait, pour ce faire, adopter un protocole de terrain spécialement dédié à cette question avec le risque, comme nous l’avons dit plus haut, de perturber encore plus les animaux. Ce rapport apporte néanmoins des éléments nouveaux sur la question.
Dans un premier temps, il tente de définir le dérangement et ses effets (évitement, fuite, modifications du comportement préjudiciables à la santé des animaux, etc.) sur les mammifères marins à l’aide de la bibliographie existante sur le sujet.
Dans un second temps, il liste et définit avec soin toutes les activités de loisir et de tourisme pratiquées sur les côtes bretonnes et normandes, susceptibles d’être dérangeantes pour les mammifères marins de la zone. Les activités concernées vont de la randonnée pédestre en groupe, perturbante pour les phoques, aux activités de whale watching et de transport maritime de passagers, plus dérangeantes pour les grands dauphins.
Enfin, il propose d’intéressantes cartes de synthèse où se croisent activités de tourisme et de loisir en mer et aires de répartition des grands dauphins, des phoques gris et des phoques veaux-marins.
Il ressort de tout cela que, si le dérangement des mammifères marins dans cette zone ne peut effectivement être prouvé, il existe cependant de fortes présomptions à son encontre. Ainsi, la zone allant des Ecréhou à Saint-Malo, en passant par Jersey, les Minquiers, Chausey et Granville se révèle particulièrement sensible puisqu’elle comprend non seulement une forte concentration d’activités touristiques et de loisir, mais se révèle également être un lieu de vie privilégié pour le phoque gris et le grand dauphin.
Ce travail pointe encore les difficultés que l’on rencontre dès que l’on souhaite obtenir des informations précises sur les activités de tourisme et de loisir qui existent sur cette zone. Les opérateurs, en effet, restent souvent très vagues sur leurs programmes et sur leur comportement face aux mammifères marins : s’agit-il de rencontres fortuites ou cherchent-ils activement les animaux pour satisfaire des clients? Combien de temps passent-ils en leur compagnie? A quelle distance se tiennent-ils lors des observations? Combien d’observations font-ils par sortie et par année ? Impossible de le savoir exactement !
Ce flou, volontaire ou non, ne bénéficie certainement pas aux mammifères marins.
Au final, le principe de précaution s’impose sur les côtes bretonnes et normandes. Une information plus ciblée auprès des opérateurs touristiques, ainsi que l’adhésion de ces derniers à des chartes de bonne conduite, font partie des solutions proposées. Elles pourraient conduire ces structures à prendre conscience de la présence de ces animaux et du dérangement occasionné. Il conviendrait également d’amener ces opérateurs à clarifier l’information qu’ils délivrent et leur position par rapport aux mammifères marins.
Aller sur l’eau, à la rencontre ou non des mammifères marins, exige une conduite responsable sur le terrain. Ce travail le rappelle avec insistance.
Pour consulter et télécharger ce mémoire de M1 cliquez ici.